Avec la multiplication de l’offre électrique sur nos routes, il est permis de se demander ce que la technologie des piles à combustible peut amener de plus au parc automobile mondial – ou même canadien si on se limite à notre vaste territoire!
Pourtant, au moment d’écrire ces lignes, au moins trois constructeurs d’envergure internationale proposent déjà des véhicules qui carburent à l’hydrogène : Honda avec l’édition « Fuel Cell » de sa Clarity (dans quelques états américains seulement), Hyundai avec son utilitaire Nexo disponible au pays et Toyota qui commercialise déjà la Mirai depuis 2016 au Japon et depuis 2018 au Québec. Notez d’ailleurs que la Colombie-Britannique a imité le Québec, la Mirai qui est désormais commercialisée dans la province la plus à l’ouest depuis le mois de juillet.
C’est donc avec un excès de curiosité que j’ai accepté ce bref essai routier organisé par Toyota Canada, mon périple qui débutait exceptionnellement au bureau régional de la marque à Brossard. C’est que, voyez-vous, l’hydrogène a beau être l’élément le plus abondant de l’univers, ça ne le rend pas plus accessible à partir d’une pompe commerciale. D’ailleurs, même la station de ravitaillement de l’entreprise sur la rive sud de Montréal est temporaire, ce qui expliquait d’emblée mon autonomie réduite (250 km) pour ce premier réel contact avec l’une des voitures les plus étranges sur la route en 2019.
Comment ça fonctionne une voiture à hydrogène?
Avant de vous livrer mes commentaires, je me dois au moins d’expliquer sommairement comment fonctionne cette « futuristique » voiture, le mot Mirai qui signifie justement futur en japonais. Commençons d’abord par le moteur électrique qui s’occupe d’acheminer les 151 chevaux et les 247 lb-pi de couple optimal aux roues motrices avant. C’est d’ailleurs ce qui explique le silence du véhicule au démarrage.
Bien qu’il soit alimenté par une batterie à hydrure métallique de nickel (Ni-MH) (notamment pour le démarrage et pour épauler les accélérations plus corsées), c’est un autre bloc de batteries – à combustible celui-là – qui prend la relève aussitôt le démarrage complété. Évidemment, l’opération se fait sans qu’on le remarque.
C’est dans ces piles à combustible logées sous le plancher de la voiture qu’a lieu une réaction chimique entre l’oxygène acheminé par les larges entrées d’air à l’avant et l’hydrogène emmagasiné dans deux réservoirs de carburant, l’un étant installé sous la banquette arrière, et l’autre, glissé derrière cette banquette. Vous aurez compris que cet arrangement a une incidence directe – et négative – sur l’espace dans le coffre et même sur la possibilité d’abaisser la banquette pour le rangement d’objets encombrants.
La réaction chimique entre l’oxygène et l’hydrogène s’occupe de produire l’électricité requise pour faire « tourner » le moteur électrique à l’avant. Et puisqu’il s’agit d’une voiture électrique, la boîte de vitesses ne compte qu’un seul rapport.
Au sujet de l’autonomie
Je me dois de revenir sur l’autonomie théorique de la voiture qui, à ma grande surprise, n’était que de 184 km à mon départ des bureaux de Toyota à Brossard. Pourtant, on m’avait promis 250 km, la station temporaire aménagée là-bas qui a seulement la capacité de remplir les réservoirs de la voiture à moitié. D’ailleurs, même l’écran supérieur de la planche de bord affichait une batterie à demi remplie. Pourtant, l’autonomie affichée était bel et bien 184 km.
Après un bref entretien avec Patrick Ryan, directeur régional des ventes chez Toyota, j’ai compris pourquoi la voiture affichait cette distance raccourcie. M. Ryan m’a expliqué que l’ordinateur de bord tenait compte du type de conduite des conducteurs précédents. Autrement dit, cette Mirai qui comptait moins de 3 000 km au compteur, a assurément été essayée par plusieurs conducteurs différents, tous dotés d’un style de conduite unique. Vraisemblablement, le ou les conducteurs précédents avaient le « pied pesant ».
Un design discutable et un habitacle « Priustique »
J’essaie tant bien que mal de ne pas trop discuter de la silhouette d’un véhicule – car les goûts, ça ne se discute pas –, mais à l’occasion, je me laisse aller. Je ne suis pas payé pour lancer des roches au designer de la Mirai non plus qui, sans aucun doute, devait trouver le moyen d’attirer l’attention tout en satisfaisant les critères très stricts reliés à ce type de motorisation.
Honnêtement, si la voiture n’avait pas été décorée de cet immense autocollant latéral « Propulsée à l’hydrogène », la Mirai aurait probablement passé inaperçue dans la circulation lourde. Après tout, la voiture à hydrogène ressemble un peu à la Prius, avec plus de verticalité tout de même et, bien sûr, cette séparation notoire entre le capot et les ailes avant. Malgré tout, la Toyota Mirai se distingue suffisamment de ses paires avec ce look de « voiture verte » qui fait plaisir aux pionniers qui oseront en faire l’acquisition.
Les concepteurs de la Mirai ont aussi voulu séduire le public intéressé par cette curieuse voiture avec un habitacle très proche de ce qui est proposé à bord de la Prius. Les courbes entrelacées, l’écran asymétrique, le levier de la transmission similaire à celui de l’hybride, même ce large écran d’information monté plus haut sur la planche de bord rappelle l’ambiance de la Prius.
Pour contrôler la climatisation, cette autre portion tactile logée entre les deux occupants des places avant est très tendance, mais une fois de plus, je me dois de rappeler que cette technologie oblige le conducteur à quitter la route des yeux lorsqu’il veut jouer avec la température de l’habitacle. C’est beau, facile à nettoyer, mais pas aussi intuitif qu’un régiment de boutons.
La Toyota Mirai est une voiture haute sur pattes, du moins à l’intérieur. La hauteur des sièges n’est pas sans rappeler celle d’un multisegment. Bref, on se glisse à l’intérieur de la Mirai, au lieu d’y descendre et, une fois assis, la mollesse des sièges indique que la randonnée sera feutrée au possible.
À l’arrière, l’accoudoir central annule la possibilité d’accueillir un troisième passager derrière, mais en revanche, cette frontière artificielle sépare les deux bambins qui prennent place derrière, en plus d’abriter les contrôles de la sellerie chauffante et un peu d’espace supplémentaire.
Le verdict… au volant
Et puis, comment se comporte-t-elle cette électrique propulsée par l’hydrogène? Le mot clé ici est « tranquillité », la Mirai qui joue définitivement la carte du confort et du silence de roulement. Évidemment, la motorisation électrique à l’avant se traduit par un calme plat qui est toutefois dérangé quelque peu lorsque le pied droit appuie fort sur la pédale de droite, le compresseur d’air qui travaille un peu plus pour acheminer l’oxygène vers l’arrière, afin que la réaction chimique ait lieu.
Mais pour le reste, la conduite de la Mirai est sans histoire. Bon, il y a du roulis lorsqu’on pousse un peu dans les virages et la mollesse des suspensions fait en sorte que le museau s’incline fortement vers l’avant lors d’un freinage d’urgence, mais bon, la Mirai n’a pas été conçue pour battre des records de temps en circuit fermé; sa mission est tout autre!
Bien entendu, avec 151 chevaux de puissance, la Toyota Mirai n’est pas une foudre de guerre à l’accélération, d’autant plus qu’elle est lourde cette voiture, à 1 850 kg! Heureusement, le couple plus généreux aide lorsqu’est venu le temps de dépasser sur l’autoroute. La direction demeure également très légère (et même un peu floue), mais en ville à basse vitesse, la Mirai est très facile à manier. Le contraire aurait été étonnant d’ailleurs!
Le mot de la fin
Au moment d’écrire ces lignes, la Toyota Mirai demeure un projet limité aux flottes commerciales. La trop faible disponibilité des stations de ravitaillement rendrait l’utilisation de la voiture assez compliquée. Et pour ceux qui se demanderaient combien coûte une Mirai, sachez que cette berline qui abrite nombre de nouvelles technologies très chères n’est pas donnée. Le prix demandé par Toyota Canada ? 73 870 $.
À mon avis, il est encore trop tôt pour savoir si l’hydrogène va éventuellement devenir une énergie alternative à l’électricité qui, pour le moment, est loin devant dans cette course à l’énergie propre. Au moins, la seule émission émise par cette Toyota Mirai peut se boire directement à partir du trou d’échappement à l’arrière de la voiture. C’est d’ailleurs à quoi sert le petit bouton H2O qui purge le système après une randonnée!
En passant, Toyota vient de dévoiler le prototype de la prochaine génération de la Mirai, et on constate que le fabricant a décidé que le design « ordinaire » de la voiture devait changer. Voici un premier aperçu de la prochaine Mirai et de sa silhouette épurée. Le modèle, qui aura une configuration à propulsion, devrait être commercialisé vers la fin de 2020.
On aime
Son côté innovateur
La seule émission produite consiste d’eau !
Roulement très doux, silencieux
On aime moins
Un design pas très futuriste
Aucune infrastructure permettant de faire le plein
La concurrence principale
Aucune