• Auto123 effectue un premier essai du Mercedes-Maybach EQS 680 SUV 2024.
Nanaimo, Colombie-Britannique - Ce n’est pas la première fois que la fée EQ transforme une Mercedes de sa baguette électrique. D’autres EQB, EQE et EQS (berlines et VUS) roulent déjà. On en retrouve même au sein de Mercedes-AMG, la division ultra performance du groupe.
Un empressement à embrasser la mobilité durable qui va de soi puisque Mercedes s’est engagée à électrifier l’ensemble de ses divisions d’ici 2030 grâce à un magot de 40 milliards d’euros.
Mais l’avènement du Mercedes-Maybach EQS 680 SUV constitue une primeur. C’est la première fois, en effet, qu’un VUS ultra luxueux se fie essentiellement à un escadron d’électrons pour avancer, foncer et épater. L’état-major le répète à qui veut l’entendre pour bien souligner que ce lancement se produit avant que Rolls-Royce, Bentley ou n’importe quel autre marque de très grand luxe n’introduisent leur propre utilitaire électrique.
Elles y travaillent mais Benz les a devancées, c’est ce qui compte.
Et tiens, justement, à propos de compter…
J’ai conduit le Mercedes-Maybach EQS 680 SUV le long des 207 km, dont plusieurs enchanteurs, qui relient Nanaimo à Tofino, sur l’île de Vancouver, afin d’en vérifier les qualités et d’en débusquer les possibles irritants. Mais je ne peux pas vous en dire le prix car les représentants de la marque n’étaient pas prêts à nous le révéler. Son annonce ne devrait néanmoins tarder puisque la compagnie souhaite offrir son dernier-né aux Canadiens d’ici la fin de l’année.
Vous me demandez de deviner ? Je parierais autour de 300 000 $ puisque le « simple » Mercedes-Benz EQS 580 4Matic SUV commence à 159 000 $ et que le Rolls-Royce Cullinan-pas-encore-électrique dépasse allègrement le demi-million de dollars.
Chose certaine, ça sera beaucoup de bidou.
Et qu’est-ce que j’obtiens en retour, mon minou ?
Deux moteurs électriques, une puissance combinée de 649 chevaux et un couple de 700 lb-pi, un poids pachydermique de trois tonnes mais des accélérations ébouriffantes de 0 à 100 km/h en 4,3 secondes, la traction intégrale 4Matic de série et même des roues arrière directionnelles (jusqu’à 10 degrés dans les espaces de stationnement exigus).
Quoi d’autre? Une suspension pneumatique et des amortisseurs adaptatifs (peu importe notre vitesse ou les crevasses que la route place en travers de notre chemin, cet utilitaire colle et survole), une batterie lithium-ion de 108.4 kW, une consommation autour de 23 kWh aux 100 km, une autonomie de 530 km et une demi-heure pour récupérer 80% de charge.
J’ai brassé tout ça sans ménagement durant mon (trop court) galop d’essai, d’une manière qu’aucun propriétaire sain d’esprit ne le fera, et j’ai tellement aimé ce que j’ai vécu que je me suis mis à rêver d’un billet de loto enfin gagnant.
Wooosh ! fait le bolide quand on défonce l’accélérateur et qu’on s’enfonce dans un fauteuil conçu par un ostéopathe mais dodu comme une doudoune.
Vrp-vrp-vrp-vrp ! font les Pirelli Scorpion de 21 po quand ils débordent sur les rainures d’avertissement graffignées dans l’asphalte, le seul son inopportun qui ose s’inviter dans un habitacle autrement isolé du monde extérieur comme un couvent de carmélites. À ce propos, les designers ont aménagé une tablette sous la lunette qui, en plus de renfermer des haut-parleurs, isole complètement la cabine du coffre, dès lors rehaussant l’effet recherché du cocon ouaté.
Zzzzzzz ! fait le passager qui profite sans pudeur du confort extraordinaire du Mercedes-Maybach EQS 680 SUV pour se taper une sieste.
L’intérieur du Mercedes-Maybach EQS 680 SUV 2024
Car ici s’impose le fer de lance de cette proposition automobile peu banale : jouir de la cabine d’un char comme si c’était la seule chose qui ait de l’importance en ce bas monde.
Ce « camion » signé Maybach a beau disposer d’un empattement plus généreux qu’un GLS (3210 mm vs 3135), il ne veut rien savoir de trois rangées de sièges. Son volume habitable, il l’offre aux occupants des deux fauteuils capitaine (lesquels peuvent céder leur place à une banquette si le proprio nourrit à ce point un esprit famille mais ça serait étonnant vu les habitudes qu’il a développées dans la classe Affaires des avions commerciaux ou à bord de son jet privé).
Le cuir, le verre, le bois et le métal s’entrelacent dans toutes les directions pour créer une orgie de formes sensuelles qui sont autant un régal pour la vue que le toucher. Le conducteur a sous les yeux l’Hyperscreen, c’est-à-dire un écran géant qui s’étire d’une portière à l’autre. Au centre, une navigation si réaliste qu’on la dirait tracée au sol par un drone qui nous escorte, l’une des 1001 fonctions disponibles ; à gauche, des infos davantage utiles au pilote, comme l’autonomie résiduelle ; à droite, un espace réservé au passager qui peut pianoter une destination puis la glisser au centre pour le bénéfice du conducteur, ou encore écouter un film qui se mettra en pause chaque fois qu’un capteur détectera que les yeux du conducteur lâchent la route pour s’aventurer là où il ne devraient pas s’attarder.
Caché derrière ce festival de diodes et d’icônes, un diffuseur relâche à intervalles programmables des bouffées de 12 Mood, le parfum conçu exprès pour ce véhicule.
Quant aux places arrière, sortons le dictionnaire des superlatifs.
Boulot ou dodo ?
Deux écrans de 11,6 po, des casques d’écoute sans fil, un mini tablette électronique amovible pour contrôler tant de choses alors qu’il y a tant de trucs que je n’ai pas encore appris à faire avec mon propre iPad, un double toit ouvrant, deux autres tablettes enfouies dans une caverneuse console qui servent cette fois à travailler, manger ou jouer aux cartes, des places fabuleuses…
… surtout celle de droite car en cliquant sur les bons boutons et en souhaitant que le trône devant nous soit vide, on obtient une divine couchette, un réfrigérateur dont la règle non écrite spécifie « champagne seulement », comme d’ailleurs le suggère les deux flûtes en argent qui reposent dans leur casier et qui, une fois remplies de bulles, se dressent sans souci au bout de la console grâce à un astucieux système de clips.
C’est sans parler de l’incroyable sono Burmester à 15 haut-parleurs baptisée 4D Surround et vous comprenez pourquoi quand vous vous arrangez pour que le massage dans votre dos ne soit pas juste l’affaire de poches d’air qui se gonflent et se dégonflent aléatoirement mais bien au rythme de la musique choisie. Rien de mieux qu’un coup de grosse caisse dans les lombaires ou de cymbale dans les omoplates !
Le genre de jouissance qui place le proprio devant un dilemme cornélien : je conduis ou j’embauche un chauffeur ? Décision, décision ! Mais les acheteurs visés par le Mercedes-Maybach EQS 680 SUV ont accès à des solutions qui échappent aux communs des mortels.
Ainsi, quand j’ai fait remarquer que même lorsqu’on retirait la glacière optionnelle de l’espace de chargement, les litres disponibles (440L) pour l’espace de chargement restaient bien chiches, on m’a expliqué que les clients de toute façon faisaient voyager leurs bagages via un autre véhicule de leur collection.
Sans oublier le secrétaire, le cuisinier, le jardinier, l’entraîneur personnel, le gourou, la nounou et les toutous !
Des plaintes
Enfin, n’exagérons rien. Disons des critiques constructives. Je pense en premier lieu aux marches-pieds qui ceinturent les flancs du Mercedes-Maybach EQS 680 SUV. À mon humble avis, ils sont aussi jolis qu’inutiles. Au moins, s’ils étaient rétractables. Sinon, bords de pantalon souillés et talons aiguilles en péril, garanti !
Par ailleurs, quand le crépuscule tombe, l’habitacle s’illumine et chasse la discrétion comme une indésirable. Je l’ai compris quand j’ai voulu le photographier. Il y a une telle abondance de couleurs, de lumières, de textures et de formes que mon iPhone ne savait plus où donner du viseur.
On peut en déduire que ce EQS 680 est « too much ! », une expression dont j’utilise à dessein les deux sens, comme dans « c’est formidable ! » ou alors exprimée avec un léger ton condescendant parce que c’est juste trop.
Bref, nous sommes loin du classicisme d’une Rolls ou d’une Bentley. D’un autre côté, il est fort possible que cet aspect ludique de la cabine séduise une clientèle jeune, ce qui réjouira à fond la caisse les patrons de Stuttgart.
L’association sidérale
Il est tout à fait courant de voir des marques d’automobiles se trouver un porte-parole ou endosser un produit ou un évènement. Mercedes-Maybach vient de le faire. Son choix s’est porté sur Space Perspective.
D’ici la fin de 2024, si tout va bien (après les pré-tests, les tests et toute la bastringue qui éviteront une tragédie similaire à celle récente du Titan), la compagnie cofondée par Jane Poynter et Taber MacCallum donnera le coup d’envoi à des voyages dans l’espace. Enfin, à 100 000 pieds dans les airs, ou 30 km dans le ciel (99% de l’atmosphère se situant à 31 km de la Terre).
Les projets Virgin Galactic et Blue Origin, respectivement les hobbies des milliardaires Richard Branson et Jeff « Amazon » Bezos, iront trois fois plus haut mais avec des méthodes pas mal plus explosives et contraignantes sur le physique des astronautes amateurs.
Pour sa part, Space Perspective sanglera huit passagers et un capitaine à chaque tour de manège et les deux seules conditions à remplir seront d’avoir au moins 18 ans et de casquer 125 000$ US. Une fois ces petites formalités réglées, leur capsule carbone neutre s’élèvera vers les étoiles grâce à un ballon plein d’hydrogène.
Ce que fera Maybach au juste avec Space Perspective reste à être défini dans un futur proche. On sait au moins que, sur le plancher des vaches, les touristes de l’espace seront baladés en Mercedes-Maybach EQS, que ses designers auront un mot à dire sur le décor feutré de la nacelle vitrée, laquelle emportera un buffet et un bar autour duquel les voyageurs éblouis étancheront leurs émotions.